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Le biais d’ancrage

Le biais d’ancrage

Dans le cadre d’une expérience menée par Thomas Mussweiler et Fritz Strack, on a d’abord interrogé un premier groupe de participants à savoir si Mahatma Gandhi était décédé avant ou après l’âge de 140 ans. Ensuite, on a demandé à un deuxième groupe de sujets si ce dernier était décédé avant ou après l’âge de 9 ans.

Sans surprise, tout le monde a répondu correctement.

Par la suite, on a posé cette question à l’ensemble des participants :

D’après vous, quel âge avait-il à son décès?

Alors que la réponse moyenne obtenue a été de 67 ans pour le premier groupe, elle a plutôt été de 50 ans pour le second groupe!

Comment peut-on expliquer une telle différence dans les résultats?

Le biais d’ancrage décrit ce qui se passe lorsque nous prenons une décision fondée sur des éléments d’information peu pertinents. En effet, si vous ne saviez pas que Gandhi était décédé à l’âge de 78 ans, votre réponse était certainement influencée par l’âge présenté par les chercheurs.

De toute évidence, à la Bourse, cette erreur de jugement est très présente, surtout lorsque notre investissement s’avère non profitable. Même si la meilleure décision est de le liquider, nous le conservons dans l’unique espoir de le revendre à son coût d’acquisition (qui représente ici l’information peu pertinente).

En effet, il est bon de se rappeler ceci : le prix payé pour une action n’a aucune valeur ajoutée dans un processus décisionnel. Demandez-vous plutôt : « Si je n’étais pas un actionnaire de la compagnie XYZ, est-ce que je le deviendrais aujourd’hui? » Si vous répondez par la négative, liquidez immédiatement votre position. Ainsi, vous limitez les dégâts et, surtout, vous diminuez votre niveau de stress, peut-être dans l’espoir d’avoir un jour la sagesse de Gandhi!

 

Source:

Olivier Sibony (2020). You’re About to Make a Terrible Mistake. Little Brown Spark.

 

 

La différence entre le marché boursier et l’économie

La différence entre le marché boursier et l’économie

Étant donné le caractère imprévisible du marché boursier, il est normal de le voir se comporter différemment de l’économie.

En effet, il y a des jours où les indices de référence sont fortement à la hausse ou à la baisse, même si, de manière générale, le contexte économique demeure relativement stable.

Toutefois, tôt ou tard, c’est l’économie qui aura préséance.

Pour mieux saisir ce point, rien de mieux que l’analogie d’une personne qui promène son chien en laisse. Durant le trajet, le chien (marché boursier) peut s’éloigner de son maître (l’économie) s’il est distrait, par exemple, par un autre animal. Par contre, en fin de compte, les deux arriveront à destination en même temps, car c’est le maître qui tient les rênes.

Aujourd’hui, même si les cours boursiers demeurent volatils, l’économie globale a repris du poil de la bête, entre autres grâce à l’intervention des banques centrales et des gouvernements ainsi qu’à la reprise de l’activité économique, d’où l’importance de demeurer investi!

Pour les intéressés, je vous invite à visionner cette vidéo qui résume bien le propos :

 

Et si la chance vous souriait ?

Et si la chance vous souriait ?

Selon vous, quels sont les facteurs qui contribuent au succès professionnel?

L’intelligence, le talent et la persévérance sont les principaux critères de réussite évoqués dans les médias, le système d’éducation, les livres de croissance personnelle et le milieu familial. Ainsi, cette quête semble être à la portée de tous, ce qui est très encourageant. Dans la réalité, ce n’est malheureusement pas suffisant. En fait, vous connaissez sûrement une personne intelligente, talentueuse et tenace qui n’a pas encore obtenu l’emploi rêvé, décroché un premier grand rôle à la télévision ou réussi en affaires. Que cela vous plaise ou non, le facteur chance peut influer considérablement sur la probabilité de succès.

Par exemple, l’acteur américain Bryan Cranston connaît la gloire après avoir personnifié Walter White dans la série culte Breaking Bad. Or, saviez-vous que les acteurs John Cusack et Matthew Broderick avaient préalablement refusé le rôle vedette? Grâce à cette occasion en or, la carrière de Bryan Cranston a finalement pris son envol.

« Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas, on ôtera même ce qu’il a. »

— Matthieu, chapitre 25, verset 29

 

En 1968, le sociologue américain Robert K. Merton s’est inspiré de cette référence évangélique pour expliquer le phénomène par lequel les chercheurs scientifiques réputés avaient tendance à se voir attribuer davantage de crédit pour une idée ou des projets de recherche aux dépens de scientifiques plus jeunes ou inconnus – c’est ce qu’il a appelé « l’effet Matthieu ». Alors, dans le cas de Bryan Cranston, le simple fait qu’il soit maintenant un acteur bien établi lui donne plus d’occasions de jouer des rôles de premier plan au cinéma et à la télévision. C’est pourquoi il ne faut pas sous-estimer le facteur chance dans l’équation du succès. Si vous n’êtes pas encore convaincu, lisez ce qui suit.

Sans contredit, La Joconde, ou Portrait de Mona Lisa, est l’une des œuvres d’art les plus célèbres et les plus convoitées au monde. Jusqu’à tout récemment, ce tableau attirait entre 15 000 et 20 000 visiteurs par jour et sa valeur est estimée à un milliard d’euros! Mais qu’est-ce qui explique une telle notoriété? Son sourire énigmatique, le mystère entourant son identité ou le fait que cette peinture ait été réalisée par Léonard de Vinci? Eh bien, il paraît que le véritable engouement n’a débuté qu’en 1911 lorsqu’elle a été volée! En effet, après deux ans de recherche intensive par les corps policiers et de couverture médiatique internationale, son succès a été instantané auprès du grand public lorsqu’elle a retrouvé sa place au musée du Louvre à Paris. Il s’agit ici d’une autre belle manifestation de « l’effet Matthieu ».

De toute évidence, nul ne peut prédire avec certitude si vous bénéficierez un jour de « l’effet Matthieu ». Vous devez donc lâcher prise sur le résultat et vous concentrer sur les aspects sur lesquels vous exercez un contrôle. À l’image de la Mona Lisa, je vous invite donc à garder le moral, car la chance pourrait bientôt vous sourire.

Sources

Europe 1 – Le Jdd. Une journée dans la vie de la Joconde, 20 juin 2017.

Robert H. Frank. Success and Luck: Good Fortune and the Myth of Meritocracy, Princeton University Press, 2016.

Sheena McKenzie. Mona Lisa: The theft that created a legend, CNN, 19 novembre 2013.

 

Échec et mat

Échec et mat

Lorsque Tiger Woods était au sommet de sa carrière, le professeur de finance Joel Greenblatt avait l’habitude de poser cette question à ses étudiants :

Quelle stratégie utiliseriez-vous pour battre le célèbre golfeur?

Il va sans dire que, compte tenu de sa domination sur le circuit professionnel, il était impensable d’envisager un scénario où un individu moyen serait en mesure de remporter une partie de golf contre le meilleur joueur des temps modernes.

La solution proposée par M. Greenblatt était donc fort simple : ne jouez pas au golf contre lui! En effet, l’objectif est d’amener Tiger Woods à rivaliser avec vous dans une activité pour laquelle vous êtes certain d’avoir le dessus. Vous êtes champion au jeu d’échecs? Mettez-le au défi!

Je suis d’avis que ce principe est à la base du succès dans le monde des affaires.

À cet égard, l’entrepreneur à succès Peter Thiel avance même que « la concurrence, c’est pour les perdants » et nous invite à répondre à un besoin encore non assouvi en faisant preuve de créativité et d’ingéniosité. Ainsi, nous serons en mesure d’offrir un produit ou un service unique en son genre nous permettant d’œuvrer dans un créneau dans lequel nous sommes roi et maître. À un tel point que si l’on demande à n’importe quelle personne de nommer la meilleure stratégie pour vous déloger, elle proposera peut-être une partie d’échecs!

Source: Joel Greenblatt. Common Sense: The Investor’s Guide to Equality, Opportunity, and Growth. Columbia Business School Publishing, 8 octobre 2020.